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Energie & Mines Afrique

Le paradoxe des investissements énergétiques en Afrique


Rédigé le 12 Décembre 2025 à 16:42 | 0 commentaire(s) modifié le 12 Décembre 2025 - 16:54

Massamba Ndakhté Gaye
Ndakhté M. GAYE est un journaliste d'investigation engagé dans le suivi citoyen des obligations... En savoir plus sur cet auteur

EMA - L'Afrique, bien qu'étant un acteur majeur de la sécurité mondiale en pétrole et gaz, est paradoxalement en voie de rester « pauvre en énergie » d'ici 2030


Un article axé sur la présentation de Rita Madeira, responsable du programme Afrique de l'Agence international de l’énergie (AIE), relatives aux principales tendances énergétiques en Afrique et publié sur le site de la conférence MSGBC 2025 Dakar, relaie l'avertissement central de l’organisation : les investissements énergétiques en Afrique ne suivent pas le rythme de la demande croissante et de la démographie.

Le continent, bien qu'étant un acteur majeur de la sécurité mondiale en pétrole et gaz, est paradoxalement en voie de rester « pauvre en énergie » d'ici 2030, avec une consommation énergétique moderne par ménage jugée très faible.

Le seul point positif marquant est la croissance rapide de l'énergie solaire photovoltaïque (PV), qui capte déjà 62 % du financement des énergies renouvelables et est attendue comme la source dominante d'ici 2030.

Analyse critique : le paradoxe de la richesse sans accès

Le point le plus frappant de l'analyse de l'AIE, mis en exergue par l'article, est la dichotomie entre l'abondance des ressources fossiles destinées à l'exportation et la persistance de la précarité énergétique domestique.
  • Le mythe de la richesse qui ruisselle : l'article souligne le rôle de l'Afrique dans la sécurité mondiale en pétrole et gaz. La critique réside dans le fait que, depuis des décennies, cette contribution n'a pas réussi à électrifier ou à fournir des modes de cuisson propres à une large partie de la population. Les investissements massifs dans les hydrocarbures africains sont principalement axés sur l'extraction et l'exportation (répondant à la demande mondiale), et non sur la création de chaînes de valeur domestiques ou l'extension des réseaux électriques locaux. L'absence d'un lien structurel fort entre les revenus d'exportation de gaz/pétrole et le financement de l'accès universel à l'énergie est une lacune majeure des politiques d'investissement.
L'élan solaire : un moteur, non une solution unique

L'optimisme de l'AIE concernant le solaire PV est justifié par la baisse des coûts, mais la critique doit contextualiser ce boom :
  • Le défi de l'échelle et du réseau : bien que le solaire PV soit la source la moins chère, son adoption rapide se heurte souvent à la faiblesse des infrastructures de réseau et à la nécessité de solutions de stockage coûteuses. Pour une grande partie du continent, l'accès universel nécessitera une combinaison de grands projets connectés au réseau et de solutions décentralisées (mini-réseaux, kits solaires domestiques). L'investissement insuffisant dans les lignes de transmission et les réseaux de distribution reste un goulet d'étranglement structurel qui freine l'intégration rapide de cette électricité moins chère.
  • L'obstacle du financement (le « Pourquoi » profond) : l'article mentionne les "contraintes financières" comme une raison de la faible consommation. C'est l'essence du problème. L'Afrique a besoin de centaines de milliards de dollars d'investissements pour atteindre ses objectifs climatiques et de développement. Ces investissements sont entravés par des facteurs externes (taux d'intérêt élevés, risque perçu, dette souveraine élevée) et internes (gouvernance, transparence réglementaire). Le solaire peut être la technologie la moins chère, mais si les pays africains ne peuvent pas lever le capital nécessaire à des conditions abordables, l'écart d'investissement persistera.
Le biais contextuel

Il est crucial de noter que cet article provient d'une plateforme promouvant une conférence sur le pétrole, le gaz et l'électricité (MSGBC Oil, Gas & Power).
  • Une transition "Double" : la mise en avant du rôle de l'Afrique dans la sécurité mondiale en gaz et pétrole sert potentiellement le narratif d'une "transition juste" qui justifierait la poursuite des investissements fossiles (notamment gaziers) en Afrique, même lorsque l'AIE, dans d'autres rapports, préconise la fin des nouveaux projets d'hydrocarbures. La critique est que cette approche risque de ralentir la transition locale en faisant concurrence aux investissements nécessaires dans les énergies renouvelables et en verrouillant les économies dans des infrastructures de combustibles fossiles sur le long terme.
 
L'article axé sur les principales tendances énergétiques en Afrique de l'AIE est un appel d'urgence bienvenu, mais il met en lumière un échec structurel : l'Afrique est riche en ressources énergétiques mais pauvre en accès énergétique.

Sa réécriture critique souligne que le défi n'est pas seulement technologique (le solaire est là et bon marché), mais fondamentalement financier, politique et structurel. Pour combler l'écart d'investissement, il faudra :
  1. Réorienter une part significative des revenus des exportations de ressources vers le financement des infrastructures énergétiques domestiques.
  2. Mobiliser des financements concessionnels et réduire le coût du capital pour les projets d'énergies renouvelables en Afrique.
  3. Prioriser l'accès universel par des investissements massifs dans les réseaux de distribution et les solutions décentralisées, au lieu de se concentrer uniquement sur les projets massifs d'exportation d'hydrocarbures.
 
Wala bôk



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